Institut Panafricain du Développement Durable
Plus haut, plus vite et plus fort pour prévenir la réalisation des dommages environnementaux, climatiques et autres.
La compliance est devenue en très peu de temps une exigence quasiment universelle dans le monde entier pour toutes les entreprises, sans qu’il n’en existe aucune définition ni légale ni jurisprudentielle, en même temps que l’on trouve autant de définitions doctrinales que d’auteurs s’étant risqués à les proposer. Ce concept n'a pas de traduction exacte en français. Ce qui complique sa mise en œuvre pratique en dehors de la sphère anglo-saxonne. On sait néanmoins que la compliance est le résultat d’une importation culturelle et idéologique depuis les Etats-Unis, qui est née initialement dans le secteur bancaire et financier pour proposer une réponse à la dérégulation dont il a bénéficié, et dont il a abusé. Sa finalité initiale a été la prévention de ces abus, en exigeant des banques de surveiller et de prouver leur conformité, et de signaler toute non-conformité dans un objectif de prévention des risques bancaires sériels. On comprend aisément l’exigence de transparence, laquelle est devenue un devoir général et quasiment universel, y compris en matière environnementale et climatique. On connait également l’exigence de conformité. La question demeure néanmoins : conformité à quoi ?
Il n’existe aucun doute que les activités économiques doivent se réaliser en conformité avec les lois, les règlements, ainsi que toutes les autres sources formelles ou informelles les régissant, qui leur sont externes en ce sens qu’elles leurs sont imposées par les autorités étatiques ou judiciaires. Mais la finalité de la compliance est manifestement plus ambitieuse que la seule conformité. Ce en raison du contexte de dérégulation juridique dans lequel elle est née qui a révélé les limites du droit positif. Lorsque le législateur décide de déréguler, ou lorsqu’il ne sait pas, ou ne sait plus réguler ou régir certaines activités telles que l’innovation financière par le passé, ou plus récemment l’intelligence artificielle ou la génétique qui se développent trop rapidement sans lui laisser le temps requis pour sa réflexion. Cette finalité est d’imposer aux entreprises non pas seulement de respecter les règles en vigueur qu’elles subissent de l’extérieur, mais de les dépasser par elles-mêmes de leur propre initiative, de l’intérieur et non pas de l'extérieur, avec la compétence spécifique qui est la leur et qui n'est pas celle du législateur, dans une démarche qui s’apparente à celle de la démarche qualité. Ce pour servir la réalisation d’objectifs qui demeurent certes relativement indéterminés, mais parmi lesquelles on trouvera néanmoins de manière certaine celui de leur responsabilité sociale et environnementale, quand bien même ce concept demeure lui-même pour le moins incertain. De la sorte, la compliance peut se définir comme une démarche volontaire et interne dans les entreprises, avec l’objectif de servir non pas seulement ses propres intérêts et ceux de ses actionnaires, mais également de servir l’intérêt général. Ce avec une compréhension meilleure de ce qui constitue ses propres intérêts, savoir prévenir la réalisation de dommages dont elle supporterait la responsabilité, outre la possibilité de sanctions civiles voire pénales sévères. Sous cet éclairage, l’intérêt social bien compris d’une entreprise est indiscutablement, de manière d’être universelle, d’organiser elle-même sa propre compliance, par des procédures internes qu’il lui appartient elle-même de déterminer. Demeurent néanmoins encore une multitude de questionnements la concernant, parmi lesquelles celle de son objet, ainsi que celle de ses sanctions éventuelles. S’agissant de son objet, certains voient la compliance comme un comportement éthique pouvant être sanctionné, d’autres comme un simple devoir moral ne pouvant pas l’être, ou encore comme un engagement d’éviter les erreurs commises antérieurement, ou encore comme un engagement renforcé de transparence et d’alerte éventuelle. L’on voit bien de ce point de vue que la compliance dépasse de loin la simple conformité aux lois et aux règlements. Après avoir été cantonnée initialement aux seules activités bancaires américaines, la compliance a conquis des espaces nouveaux partout dans le monde, tels que la lutte contre le terrorisme, contre la corruption et le blanchiment, ainsi que la violation des droits des droits de l’homme, y incluant désormais la protection de l’environnement et la protection du climat.
La question des éventuelles sanctions de la compliance renvoie à celle de la force normative de cet engagement, généralement conçu comme simplement facultatif, non parfois sans arrières pensées liées au souci d’optimiser une communication commerciale. Il n’existe pas à ce jour un droit autonome de la compliance sanctionnant son ignorance. Pour autant, le manquement au devoir de compliance peut très aisément fonder une responsabilité civile dès lors que celui-ci est élevé au standard juridique universel qui est celui du comportement requis d’une personne raisonnablement prudente et diligente qui est sanctionné par une faute civile. De ce point de vue, la compliance peut aisément trouver ses sanctions dans le droit commun de la responsabilité civile, sans qu’un nouveau droit autonome ne soit requis à cet effet. La jurisprudence jouera un rôle important pour en dégager des principes directeurs clairs. A suivre …