Institut Panafricain du Développement Durable
La France condamnée pour inaction climatique. Quelles conséquences ?
En France, le Conseil d'État a rendu sa toute première décision sur le changement climatique le 19 novembre 2020, en demandant au Gouvernement français de prouver dans un délai de trois mois qu'il atteindra un objectif de réduction de 40 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) d'ici 2030, et qu'il s'adaptera aux effets du changement climatique. Il créé un contrôle judiciaire de des politiques gouvernementales avec l’objectif d’assurer que les actions climatiques soient légitimes.
La demande a été introduite par la commune de Grande-Synthe et par son maire, qui critiquaient l'inaction de l'État face aux risques climatiques. Ceux-ci ont remis en question le manque de décisions pour réduire les émissions de GES. La commune a également demandé l'annulation des décisions du Président de la République française, du Premier ministre et du ministre de la transition écologique, et a souligné l’importance de lois pour prioriser les actions climatiques. D'autres villes et associations ont soutenu ces initiatives.
Le Conseil d'État a été probablement influencé par la pression internationale et la multiplication dans monde entier des procès climatiques, renforçant ainsi les arguments de la société civile. Toutefois, la légitimité de ces actions demeure néanmoins juridiquement discutée, notamment concernant le rôle des tribunaux dans la définition de la politique climatique des Etats, qui est traditionnellement réservée à leurs gouvernements. La question centrale est celle de la légitimité des demandeurs de la protection contre le changement climatique, y compris dans le cas précis des communes comme Grande-Synthe, Paris et Grenoble, ainsi que certaines associations.
Le gouvernement français a d'abord remis en question cette légitimité, arguant que le changement climatique affecte de nombreuses communes, et qu’elles ne pourraient selon lui pas se prévaloir d’un d’intérêt spécifique à agir en justice. Cependant, les entités concernées ont pu démontrer leur intérêt à agir en justice, ce en raison de leur vulnérabilité spécifique aux risques climatiques, comme les vagues de chaleur et les inondations. Le maire, bien qu'identifié comme citoyen, a vu néanmoins sa demande rejetée car il n’a pas pu démontrer un intérêt particulier pour agir en justice.
Par cette décision, le Conseil d’Etat français souligne en même temps l'importance de reconnaître les préoccupations des communautés pour défendre le climat ainsi que la biodiversité. Cela nécessite de prendre en compte des intérêts collectifs, et de considérer chaque citoyen comme légitime à agir pour l'environnement. Il évoque les obligations des États concernant la réduction des émissions de gaz à effet de serre, et appelle à des mesures précises pour assurer l'engagement dans ces domaines. Ce quand bien même les instruments internationaux demeurent décevants en ce qu’ils sont dépourvus d'effet direct.
La question qui se pose depuis cette décision est la suivante : après l’injonction de rendre des comptes de son action qui est délivrée au gouvernement français, y aura-t-il un jour une injonction d’agir de manière effective en matière climatique ? Et quelle sera la sanction si ces injonctions ne sont pas mise en application ? A suivre …